HISTOIRE DES MACHINES A VAPEUR : Débuts : machines atmosphériques

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Pression atmosphérique

Les pompes n'arrivent pas à aspirer l'eau plus de 10 mètres au dessus de la surface : phénomène longtemps incompréhensible.
1644 Torricelli utilise un tube en verre rempli de mercure qu'il retourne sur un récipient rempli de mercure (invention du baromètre) : la hauteur du mercure dans le tube (~ 76 cm) reste constante quelque soit la longueur du tube. Certains pensent que cela est du à la pression atmosphérique (76 cm de mercure correspondent à 10 mètres d'eau compte tenu des différences de masse volumique) mais d'autre pensent qu'il s'agit de forces d'attraction entre les molécules du liquide, d'autant que l'existence du vide n'est pas admis par tout le monde (la nature à horreur du vide, une substance inconnue rempli l'espace libre).
1648 Pascal a l'idée de comparer la hauteur du mercure d'un baromètre en haut du Puy de Dôme et à Clermont-Ferrand : il prouve l'existence de la pression atmosphérique.
1654 Otto Von Guericke à Magdebourg montre la force de la pression atmosphérique avec des expériences spectaculaires devant la cour : il fait le vide entre deux hémisphères de cuivre de 56 cm de diamètre puis attache de chaque coté un attelage de 8 chevaux qui n'arrivent pas à les séparer (force proche de 2 tonnes et demi).

Force de la pression atmosphérique

Problème : comment créer le vide dans le cylindre pour fournir une énergie mécanique ?
1673 Huygens utilise de la poudre à canon dans le cylindre : après refroidissement il y a un vide qui permet de déplacer un piston. Pas d'application industrielle.
1690 Papin, qui était l'assistant de Huygens, et qui étudie la vapeur (invention du digesteur, ancêtre de la cocotte minute) l'utilise pour produire du vide :
on met de l'eau dans le cylindre, on le place sur du feu : l'eau se transforme en vapeur qui soulève le piston (un cliquet bloque le piston dans cette position).
On retire le cylindre du feu : la vapeur se condense créant du vide sous le piston.

Pompe de Savery

1698 Savery invente une pompe sans piston :
La chaudière 1 produit de la vapeur sous pression.
Ouverture du robinet 3 : la vapeur pousse l"eau du réservoir 2 à travers le tuyau 5 vers l'extérieur.
Quand 2 est vide, fermeture de 3 et ouverture de 6 : de l'eau refroidi 2 et la vapeur contenue dans 2 se condense en créant un vide qui aspire l'eau de 4.
Quand 2 est rempli d'eau on ouvre 3 et le cycle recommence.

Machine lente (4 cycles par minute), problème de tenue des tuyaux à la pression si on veut remonter l'eau d'une grande hauteur, la machine ne peut être qu'à quelques mètres (<10) au dessus de l'eau à pomper (il faudrait plusieurs machines l'une au dessus de l'autre pour atteindre le fond des mines).

Pompe de Newcomen (appelée aussi pompe à feu)

1712 Newcomen construit une machine à piston à balancier :
Dans un premier temps on remplit le cylindre de vapeur, le piston monte.
Quand le piston est en haut on ferme le robinet de la chaudière et on injecte un jet d'eau dans le cylindre ce qui condense la vapeur : il se forme un vide sous le piston : la pression atmosphérique pousse le piston vers le bas, c'est le temps moteur.
Le balancier bascule et la tige de commande des pompes remonte, permettant d'extraire l'eau des mines.

En 1715 Beigthon invente un système de commande automatique des vannes (tiges liées au balancier avec des taquets qui pousse les vannes) : la machine fonctionne toute seule.

Performance : 12 coups à la minute, environ 5 chevaux, pression vapeur 0.5 bars.

En 1765 Smeaton améliore la machine (diminue le diamètre du piston et allonge sa course, améliore l'étanchéité) mais ne change pas sa disposition générale.
En 50 ans une centaine de machines sont construites, de plus en plus grandes (77 chevaux en 1777). Les progrès de la métallurgie (fonte au coke) permettent de diminuer le prix du cylindre.
En France les premières machines sont installées dans les mines du Nord (1731 à Anzin et Fresne).

Description d'une pompe à feu dans l'encyclopédie de Diderot et d'Alembert : Voir les détails ↓

C'est une machine de Newcomen (voir fonctionnement ci-dessus).
Description du dessin ci contre (d'après les planches de l'encyclopédie) :
On voit une alimentation continue d'eau au dessus du piston avec évacuation du trop plein quand il est en haut (ce qui maintient l'étanchéité, limite la température et favorise la souplesse du cuir du piston).
Repère 3 il y a un obturateur qui permet d'ouvrir ou fermer le tuyau de communication entre le cylindre et la chaudière.
Evacuation de l'eau de condensation au fond du cylindre (jet d'eau et condensation de la vapeur) :
Repère 1 : 3/4 du volume évacué à l'extérieur via un clapet (pour fermer le tuyau quand le cylindre est en dépression).
Repère 2 : 1/4 du volume envoyé dans la chaudière (cette eau a été réchauffée par la vapeur dans le cylindre).
La soupape reniflante sert à évacuer l'air au démarrage et celui dissous dans l'eau (du jet de condensation et d'alimentation de la chaudière). Cette soupape est chargée avec du plomb pour qu'elle ne s'ouvre que quand la pression est maximum. Quand le piston est en bas et que le cylindre est mis en communication avec la chaudière (la chaudière étant isolée pendant la descente du piston, sa pression est remontée), la soupape reniflante s'ouvre et laisse échapper l'air et un peu de vapeur. Elle se referme quand le piston, en remontant, découvre le cylindre froid, ce qui fait baisser légèrement la pression dans le cylindre.

Description du dessin ci contre (mécanisme de commande automatique de la vapeur et de l'eau du jet pour condensation) :
A gauche : la vapeur est ouverte et l'eau fermée : le piston remonte.
A droite : le piston descend.
La coulisse est entraînée par le balancier (comme le piston). Ses taquets actionnent des leviers qui commandent les robinets :
Vapeur : un taquet pilote la fourche F qui permet de faire basculer le poids tantôt à droite (ouverture) tantôt à gauche (fermeture).
Eau : quand le piston arrive en haut, un taquet lève le levier 1 qui libère le poids. En tombant il ouvre rapidement le robinet.
Quand le piston descend, un taquet fait remonter le poids tout en fermant progressivement le robinet. Le poids s'accroche sous le levier 1.
En bas dessin du piston. Le joint du cuir épais est pris en sandwich entre fer et plomb. Diamètre 2 pieds 6 pouces (environ 81 cm), course environ 250 cm (hauteur cylindre 8 pieds 6 pouces soit environ 275 cm).

références encyclopédie :
Lien article.
Lien planches. (Zoom : bouton + en bas)

réduire pompe à feu ↑

Machines de Watt

Machine à simple effet (pompe) :

En réparant (puis en étudiant) une machine atmosphérique de démonstration, il comprend qu'il y a une grosse perte de chaleur pendant la condensation de la vapeur dans le cylindre : le cylindre refroidit pendant la condensation, il faut le réchauffer au coup suivant quand la vapeur y est introduite (il constate que le volume de vapeur consommé par coup est égal à 4 fois le volume du cylindre). Il a alors l'idée géniale de condenser la vapeur en dehors du cylindre.

En 1769 il prend son premier brevet en 5 points :
- maintenir le cylindre toujours chaud (enveloppe de vapeur autour du cylindre)
- utilisation d'un condenseur séparé
- évacuation de l'eau avec la pompe du condenseur (il faut pomper l'eau de condensation et l'air qui était dissous dans l'eau introduite dans la chaudière)
- utilisation de la pression de la vapeur au dessus du piston au lieu de la pression atmosphérique (avec étanchéité de la tige du piston)
- soins apporté à l'étanchéité des joints (suppression de la couche d'eau au dessus du piston des machines de Newcomen).
Au début, machine à 2 soupapes : admission, échappement (dessin ci-contre) :
Le haut du cylindre est toujours en communication avec la chaudière, pour le bas du cylindre il y a 2 soupapes : une d'échappement pour le relier au condenseur (temps moteur quand le piston descend), une d'admission pour faire entrer la vapeur (quand le piston remonte).

Ensuite, pour améliorer le rendement en détendant la vapeur, utilisation de 3 soupapes : admission, échappement, transfert :
Cycle :
Quand le piston est en haut, ouverture de la soupape d'admission, la vapeur de la chaudière (0.7 bars) arrive au dessus du piston et ouverture de la soupape d'échappement, le dessous du piston est à la pression du condenseur : le piston est tiré vers le bas.
Pendant la descente, fermeture de la soupape d'admission : détente de la vapeur au dessus du piston (amélioration du rendement).
Quand le piston est en bas, ouverture uniquement de la soupape de transfert, le bas du cylindre communique avec le haut. Le piston remonte sous l'action du contre poids.
Voir une animation de ce dessin où on peut faire bouger le mécanisme avec un ascenseur, changer la vitesse...

Une des difficultés de réalisation est l'usinage du cylindre (diamètre et longueur important) qui doit être précis pour éviter les fuites.
Voir description machine à aléser de Wilkinson ↓

Watt s'associe à Boulton un industriel fortuné qui investi dans le développement des machines de Watt. En 1777 ils livrent les premières machines dans les mines de Cornouailles : les machines sont installées gratuitement, les utilisateurs payant seulement le tiers de l'économie en combustible réalisé par rapport à une machine de Newcomen. (La machine de Watt consommant un quart de celle de Newcomen, les utilisateurs donnaient à Watt autant d'argent que celui dépensé pour le charbon. Devant les fraudes nombreuses, Watt installa des compteurs de coups machine).

Ce cycle sera utilisé longtemps pour des pompes avec des pressions de vapeur de plusieurs bars pour un meilleur rendement (on les appelle les machines de Cornouaille "cornish pump" comme à crofton ou happysnapper.com).

Machine à double effet :

Pour faire tourner une roue qui peut actionner des machines (plusieurs industriels et inventeurs cherchaient également) Watt pensa un moment utiliser 2 machines simple effet agissant sur la même roue. Il pensa ensuite à utiliser la vapeur alternativement sur les 2 faces du même piston (= double effet). Avec le balancier il fallait résoudre 2 problèmes :
- du coté piston : la tige de piston effectue un mouvement rectiligne alors que l'extrémité du balancier effectue un mouvement de rotation. En simple effet, l'effort du piston est toujours vers le bas : la chaîne qui s'enroule sur le balancier convient bien mais en double effet l'effort est dans les 2 sens. En 1784 Watt fait breveter le parallélogramme dont il était très fier(dispositif de leviers articulés qui permet à l'extrémité de la tige de piston de se déplacer quasiment sur une droite et qui supprime les efforts latéraux).
- du coté roue : il faut lier le balancier à la roue. Le système bielle - manivelle étant déjà breveté (1780), Watt invente un dispositif à engrenage épicycloïdal : le planétaire de Watt.

Le piston n'exerce pas la même force tout au long de sa course (quand il est proche de ces points morts, aux extrémités de sa course, il n'agit plus sur le balancier). Pour que la machine fournisse un couple (une puissance) constant sur un tour, Watt utilise un gros volant d'inertie (pendant que le piston actionne la roue, elle accélère légèrement en emmagasinant de l'énergie puis elle restitue cette énergie quand le piston n'agit plus en ralentissant légèrement).

Pour réguler la vitesse de la machine il invente un régulateur à boules : pendule à ciseau portant 2 boules et mis en rotation par le mouvement de la machine. L'écartement des boules par la vitesse de rotation commande l'ouverture ou la fermeture du robinet d'arrivée de la vapeur.

1784 première machine double effet aux moulins d'Albion à Londres.

On peut estimer (cf. "L'aventure scientifique et technique de la vapeur" ref.) qu'entre 1776 et 1800 Watt et Boulton produisirent environ 500 machines dont les deux tiers en double effet pour machines de rotation. Ce qui représente environ 7500 chevaux : même si cela entraîna une révolution c'est une faible puissance comparée à un seul turbo-alternateur moderne (une turbine de 1500 MW correspond à plus de 2 millions de chevaux).
Watt et Boulton accumulèrent des fortunes considérables.
Watt mourut à 83 ans en 1819 après une heureuse vieillesse.